Par Jacques Rombi, directeur de publication

Dans la préface de sa nouvelle édition, Dennis Meadows (le concepteur du rapport du même nom*) explique que : « la résilience permet de continuer à vivre malgré les chocs et les surprises. On peut être résilient aux échelles individuelle, communautaire et nationale, par exemple en construisant des pistes cyclables pour que les gens utilisent leur vélo, s’ils ne pouvaient utiliser leur voiture… »
Une lapalissade qui aura néanmoins nécessité deux années de confinement et de chocs exogènes cumulés pour nous faire (enfin ?) réagir.
Une lapalissade que le chercheur, co-fondateur du Club de Rome, crie de manière désespérée depuis précisément 50 ans mais dont l’écho s’est perdu dans le brouhaha de la mondialisation.

En tous cas, ça bouge du côté de nos îles de l’Indianocéanie qui, comme nous l’écrivions sur une précédente édition, pourraient être de vrais laboratoires des nouvelles énergies.
Le dernier Budget présenté Le 7 juin dernier par le ministre mauricien des Finances, du Plan et du Développement économique, le Dr Renganaden Padayachy, fait la part belle à la production locale, l’énergie renouvelable et la résilience.
L’Ile Maurice où le secteur privé n’a pas attendu les mesures édictées par le Gouvernement, aménageant un peu partout les champs de canne devenus en partie anachroniques au profit de smart cities où il fait bon vivre (et où, du coup, on n’a moins besoin de se déplacer !)

Même son de cloche à La Réunion où les communes, les communautés d’agglomérations et le secteur privé, multiplient les initiatives en faveur d’une meilleure fluidité de circulation.
Il faut dire que le département français n’est pas aidé par la Nature en l’occurrence. Si ses reliefs montagneux en font sûrement une des plus belles îles du monde, ils ont le défaut de concentrer les flux de circulation sur une étroite bande littorale qu’il faut sans cesse aménager quoi qu’il en coûte (pour reprendre une expression à la mode). Ajoutons à cela, un développement spontané à grands coups de milliards par soucis de rattrapage avec le niveau national, et nous avons aujourd’hui cette situation ubuesque avec « un nombre de voitures qui s’accroît à mesure que le réseau routier s’étoffe… Et ce n’est sûrement pas la Nouvelle Route du Littoral (NRL) qui démentira ce fait », comme l’explique notre journaliste Olivier Pioch ci-après.

Une solution : rendre les déplacements superflus ?

En tous cas, comme à Maurice, des visionnaires (un peu en retard néanmoins) veulent fixer la population dans un lieu où le cadre de vie et la proximité des services rendraient tout déplacement superflu.

Dans la Grande Ile (Elle aussi, avec Maurice, parmi les plus belles du monde, ne faisons pas de jalouses !), la situation est plus compliquée encore.
Si les problèmes d’embouteillages sont presque exclusivement concentrés dans la capitale et sa périphérie (qui ne cesse de grossir tel un monstre indomptable,) les solutions modernes ne semblent pas marcher. Et pour causes ? les nombreuses rocades, nouvelles routes et autres téléphériques urbains sont sûrement de belles initiatives. Mais elles se heurtent aux chauffeurs de taxi be, ces taxis collectifs surchargés qui s’arrêtent n’importe où et n’importe quand et n’en font qu’à leurs têtes (aussi dures que leurs pare-chocs défoncés).
Si l’espace ne manque pas à Madagascar pour accueillir une population qui grossit de quelques 15000 bouches de plus à nourrir chaque semaine, la déforestation et la paupérisation (les deux étant liées) des campagnes se traduit par toujours plus d’exode rural vers les villes des Hautes terres, capitale en tête.
Conclusion : des bidonvilles qui poussent un peu partout, annihilent ainsi tout programme d’aménagement du territoire. Des bidonvilles déversant de l’aube au crépuscule des millions de piétons, n’ayant souvent pas les codes de la route et du citoyen, encombrant routes et trottoirs de leurs charrettes et étals improvisés. Complices inconscients des têtus chauffeurs de taxi be.
Là-bas un peu de civisme et de bon sens pourraient faire économiser des milliards d’ariary, mais la fuite en avant continue !

Le Journal des archipels distribué dans le sud de la France

Terminons ce tour d’horizon par un grand bond 9000 kilomètres au nord.
Si nos îles de l’Indianocéanie sont parmi les plus belles du monde, c’est dans une des plus belles villes du monde que notre magazine est désormais distribué : Marseille.
A croire que notre magazine est attiré par les plus beaux coins de la planète (et les plus sympas) !
En tous cas, grâce à la confiance de la Coopérative des Messageries de Presse Méditerranée que nous remercions au passage, le Journal des Archipels est dès ce numéro disponible dans 90 points de vente autour du Grand Marseille : de Pertuis à Hyères en passant bien sûr par Toulon et Aix.
Il faut dire que la diaspora de nos îles est bien représentée en région PACA (Provence Alpes Côte d’Azur) et constituera un beau noyau de lecteurs.
Une chute qui nous ramène à notre problématique de la résilience abordée au début de cet éditorial. A Marseille, à la Rue Longue des Capucins précisément, ou encore du côté de Toulon, à La Garde précisément, il est aisé de se procurer des produits et épices de l’océan Indien. Et pas n’importe lesquels : bouchons et samoussas de La Réunion, brèdes mafane ou « petsa mena » (petites crevettes rouges) de Madagascar… jusqu’aux célèbres bières THB, Phoenix et même la Dodo lé là.
Des produits souvent difficiles à trouver d’une île à l’autre mais qui abondent en région provençale. Mais que font nos organismes dédiés à la coopération régionale ? Circulez y ‘a rien à voir !

*Le « Rapport Meadows » ou « Rapport du Club de Rome, les limites de la Croissance – 1972 » démontrait pour la première fois que la croissance ne pouvait être infinie dans un monde fini.
L’édition spéciale « Les limites à la croissance » de Dennis Meadows, Donelle Meadows, Jorgen Randers, vient de paraître aux éditions Rue de l’échiquier.