Le « fady » est un concept socioculturel malgache lié aux ancêtres qui réunit un ensemble de règles et d’interdits. Il peut se limiter à un lieu, à une personne ou à certains animaux et certaines plantes. A Madagascar, ce réseau invisible de commandements ou tabous est, en général, scrupuleusement respecté. Cependant, divers facteurs, dont la pauvreté, peuvent amener une personne à transgresser un fady.
Le respect du concept « fady » peut impacter la protection de l’environnement de façon positive mais aussi négative.

Par Valisoa Rasolofomboahangy
Crédit photo : “Rhett A. Butler / Mongabay”
Photographie :  Un aye-aye (Daubentonia madagascariensis), une espèce de lémurien qui est classée en danger d’extinction mais chassée car elle est considérée comme porteur de mauvais esprits.

Les fady peuvent aussi avoir des effets négatifs sur l’environnement. Un commandement ancestral, répété de génération en génération, peut être un facteur de destruction de forêts entières. « Malgré les sanctions pénales, le tavy (culture sur brûlis NDLR) est encore très pratiqué dans l’est de Madagascar car il est profondément ancré dans la culture sur cette partie de l’île,» ditRandriamaniraka. Selon lui, dans cette région, il est fady, dans le sens où il n’est pas préconisé par les ancêtres, d’utiliser d’autres méthodes agricoles.
Autre exemple, les tortues radiées (Astrochelys radiata), une espèce endémique du sud-ouest de Madagascar classée en danger critique d’extinction sur la liste rouge de l’UICN, font l’objet d’un trafic international illégal. Ces animaux sont dangereusement menacés par des commandements considérés comme fady. En plus d’être consommées pour leur viande par la population en forte croissance dans cette région, ces tortues font l’objet de trafic à travers toute l’île et sont destinées à vivre domestiquées car elles sont considérées comme porte-bonheurs*.

Chassés car considérés comme porteurs de mauvais esprits

« Toute ma famille et moi avions chacun des tortues dans chacune de nos maisons et depuis toujours, » dit Rasoavahoaka, une ménagère de 72 ans vivant à Antsirabe au centre du pays. «  Il le faut parce qu’on nous a transmis que ça nous porte bonheur et nous protège contre les cambrioleurs. »
D’autres espèces, redoutées à cause de leur apparence physique, font l’objet de chasse clandestine. Dans de nombreuses régions, les Caméléonidés sont fady. Il est dit qu’ils portent malchance à ceux qui les aperçoivent. L’aye-aye (Daubentonia madagascariensis), une espèce de lémurien en danger d’extinction selon l’UICN et le hibou (Asio madagascariensis) sont aussi chassés car considérés comme porteurs de mauvais esprits.
Jonah Ratsimbazafy, primatologue malgache et président de l’International Primatological Society (IPS), d’après qui un lémurien récemment découvert vient d’être nommé, Microcebus jonahi,  a fait référence sur sa page Facebook aux dangers des fady sur l’aye-aye et le hibou. Selon lui, la sensibilisation à leur protection reste difficile à cause de la croyance profondément ancrée dans les mentalités que ces espèces portent malchance.

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Note de la rédaction (NDR) :
Si son extinction est liée à des fady dans certains endroits, cela n’est vrai qu’en partie. Chez les Antandroy au contraire, sa consommation est « fady » donc elle est protégée chez eux. Le fait qu’elles soient considérées également comme porte-bonheur sur les Hautes terres, les protège paradoxalement car cela les prive de liberté.