Des manifestations systématiquement interdites. Une situation politique confuse avec un président Azali tout puissant et son prédécesseur Sambi en prison. Une population confrontée au marasme économique… C’est l’état des lieux des Comores que dresse la journaliste Faïza Soulé Youssouf.

Faïza Soulé Youssouf est journaliste au sein d’Al Watwan, quotidien gouvernemental, mais aussi présidente du Syndicat national des journalistes des Comores (SNJC), ce qui l’amène à parler au noms de toute la profession, qu’il s’agisse de journalistes exerçant dans les médias publics ou dans les organes indépendants. Elle nous a accordé, en visioconférence un entretien dense. Elle y dresse l’état des lieux des Comores en termes de démocratie, de situation politique et économique.
Le SNJC s’est élevé dernièrement contre le comportement des forces de l’ordre qui ont empêché la tenue, à Moroni, d’une manifestation de contestation contre l’augmentation des prix. Un militaire s’en est pris à la rédactrice en chef d’un média indépendant et lui a brisé son téléphone.

« On importe tout, on ne produit rien »

« On importe tout, on ne produit rien. Avec la montée des prix des carburants, les Comoriens ne vont plus pouvoir suivre », indique-t-elle pour expliquer le contexte de la dernière mobilisation de la « société civile ».
« En dehors du contexte électoral, les réunions publiques ne sont pas autorisées, du coup, systématiquement les demandes de manifestation sont rejetées »… Aux Comores, le président Azali semble sans opposition depuis son élection contestée de 2019. La réforme constitutionnelle qu’il a taillé à sa mesure lui offre la perspective d’une nouvelle décennie de pouvoir.
Aucun alternative démocratique ne se profile dans un paysage politique morcelé alors que l’ancien président Sambi est en prison depuis 4 ans. « On parle de dictature ou de démocrature mais pas de démocratie », assène la journaliste.

Les jeunes fuient vers Mayotte ou la Libye

Quant à la situation économique, elle est marquée par une forte inflation dans un pays qui ne produit quasiment rien et importe sa nourriture de Madagascar et de Dar es Salam. L’offre de santé est si pauvre que les Comoriens, même de revenus modestes, préfèrent aller se faire soigner ailleurs grâce aux solidarités communautaires. « On dit ici que mourir dans un hôpital comorien c’est le signe qu’on n’est pas aimé et soutenu par sa famille », commente Faïza Soulé Youssouf.
Les jeunes fuient vers Mayotte ou empruntent les pistes périlleuses des passeurs africains, via la Libye et la Méditerranée pour atteindre l’Europe. Le bras de fer engagés en 2018 par l’Etat comorien qui refusait d’accueillir les expulsés de Mayotte s’est terminé par un arrangement diplomatique. L’histoire semble donc au point mort dans cet archipel dont le nom constitutionnel d’Union des Comores semble encore artificiel.

De notre partenaire Franck Cellier – Parallèle Sud

Vidéo sur youtube : https://www.youtube.com/watch?v=xU-4M3fXTtI&t=66s