« Nous avons déniché une nouvelle clientèle à La Réunion à la suite de notre participation à une foire, il y a trois ans », précise Erick Rajaonary PDG de Guanomad.

Il est resté optimiste malgré le contexte socioéconomique marqué par la crise du coronavirus, qui lui a fait perdre 40% de parts de marché. Le PDG de Guanomad, Erick Rajaonary, mise toujours sur l’exportation, qui assure 60% de ses ventes, tout en espérant une nouvelle « révolution verte » sur la Grande île pour permettre à sa firme d’optimiser ses potentialités de production.

Guanomad produit des engrais biologiques à base de fiente de chauves-souris depuis quinze ans avec initialement 5 employés. Aujourd’hui, l’entreprise compte une soixantaine d’employés permanents et quelques 200 à 300 saisonniers, avec des clients en Europe (France, Belgique, Pays-Bas, Croatie, Slovénie), aux Etats-Unis, en Afrique de l’Est et à La Réunion.
Le marché régional reste un atout pour Guanomad qui compte exporter 200 tonnes d’engrais à La Réunion cette année, pour quelque 80 000 dollars. « Nous avons déniché une nouvelle clientèle à La Réunion à la suite de notre participation à une foire, il y a trois ans », précise Erick Rajaonary. Au niveau régional tout peut évoluer assez vite, malheureusement en raison de la crise sanitaire les commandes mozambicaines de 700 tonnes d’engrais, équivalant à quelque 350 000 dollars, ont été annulées l’année dernière.
Pour cette année, le PDG table sur une production de 4000 à 7000 tonnes. L’exportation constitue la majeure partie des revenus pour Guanomad. Pour une production de 4000 tonnes, la société pourra en effet espérer un revenu de 1,6 million de dollars. Ce qui est cependant bien en deçà de la capacité de production qui est de 1000 à 1500 tonnes de produits finis par mois, soit plus de 15000 tonnes par an. Si la demande ne faiblit pas en raison de la crise, Guanomad pourra donc maintenir le cap.

Une politique agricole efficace

Le choix de la ville de Tulear, dans le sud-ouest de Madagascar, pour la mise en place de l’usine de transformation a été lié à la possibilité d’exportation à partir du port local. C’est dans la même région et une autre région contigüe, le Menabe, que sont exploitées également les matières premières, dans une centaine de grottes où vivent les chauves-souris à l’origine du guano transformé par la firme.
Le marché local, qui représente pour le moment 40% des ventes de Guanomad, ne saurait cependant se développer si on n’accorde pas suffisamment d’importance au secteur agricole. « Nous avons à Madagascar des superficies importantes de terrains non encore exploitées, alors que 80% de la population sont des paysans », rappelle Erick Rajaonary, avant de poursuivre qu’une « politique agricole efficace doit être mise en place pour que la situation puisse évoluer». Vers 2008, à titre d’exemple, la « révolution verte » menée à travers les régions agricoles du pays a permis à Guanomad d’atteindre une production de 13000 tonnes en une année.
La marge de progression est importante quand on sait que le recours aux engrais est encore assez limité sur la Grande île par rapport à d’autres pays : on parle d’environ 200 kilos à l’hectare pour des pays de la l’Union Européenne, ou encore de 50 kilos à l’hectare pour l’Afrique du Sud, contre 5 kilos seulement pour Madagascar.

Engagements environnementaux

L’exploitation des engrais biologiques à base de guano doit toutefois être menée de manière raisonnable pour s’assurer de la pérennité de la production. D’autant qu’une minéralisation de 15 à 20 ans est nécessaire pour certaines matières qui se mélangent aux fientes de chauves-souris pour obtenir le guano.
Ainsi, l’exploitation du guano ne peut pas s’effectuer pendant la période de l’hibernation. Une campagne de sensibilisation a été menée également auprès des populations locales qui ont, à un certain temps, chassé les chauves-souris pour les consommer. « Leur pratique de chasse permet de tuer en une heure une centaine de chauves-souris », précise le PDG de Guanomad.
La société dispose déjà depuis dix ans d’un cahier de charges environnementales. Cela inclut notamment l’interdiction d’utilisation de machines dans les grottes, ainsi que l’obligation de restauration de la zone d’exploitation du guano. Les actions menées au cours des dernières années ont permis la disponibilité continue des matières premières. « Des grottes exploitées en 2008 ont pu ainsi régénérer du guano en 2018 », spécifie Erick Rajaonary.

Liva Rakotondrasata